Marc VIDAL
7, rue du Ruisseau
66740 Laroque des Albères
Laroque des Albères, le 9 janvier 2014
Monsieur le Commissaire enquêteur
PAEN de Laroque des Albères
Monsieur le Commissaire enquêteur,
J’ai l’honneur de vous faire part de mes observations dans
le cadre de la procédure d’enquête publique en cours visant à l’instauration
d’un PAEN sur le territoire de la commune de Laroque des Albères.
Un PAEN à Laroque des Albères : en principe, un outil de protection et
de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains.
600 hectares de terrains de Laroque des Albères sont
concernés.
Le périmètre d’un PAEN est instauré par le département et
la commune et sur avis de la Chambre d’agriculture, il doit être compatible
avec le SCOT.
Un programme d’action doit être élaboré par le département
avec l’accord de la commune.
Ce programme doit préciser les aménagements et les
orientations de gestion permettant de favoriser l’exploitation agricole, la
gestion forestière ainsi que la valorisation des espaces naturels et des
paysages.
A l’intérieur de ce périmètre, le département ou, avec son
accord, une autre collectivité territoriale ou un Établissement Public de
Coopération Intercommunale (EPCI) peut réaliser des acquisitions foncières à
l’amiable, par expropriation ou par préemption.
Les biens acquis intègrent le domaine privé de la
collectivité locale ou de l’EPCI et doivent être utilisés pour réaliser les
objectifs du programme d’action, ils ne peuvent pas être inclus dans une zone
urbaine ou à urbaniser du PLU.
Le SCOT n’est toujours pas approuvé, et au vu du projet il ne remplit pas
son rôle
Comme toujours dans ses discours ou explications lors des
séances publiques, sur le Plan Local d’Urbanisme (PLU), le maire, pour
justifier ses décisions, fait toujours référence au Schéma de Cohérence
Territorial (SCOT) dont le maître d’ouvrage est le Syndicat Mixte. Le maire de
Laroque est membre du comité syndical.
Le périmètre du SCOT s’étend le long du massif des Albères
jusqu’au poste frontière du Perthus limité au sud par la frontière
franco-espagnole et au nord par l’agglomération perpignanaise.
L’élaboration de ce document SCOT Littoral Sud a été engagée le 31 janvier
2003 par le Syndicat Mixte créé le 17 décembre 2002 qui comprend 20 communes
soit 56000 habitants.
Voilà donc 10 ans que nos chers élus travaillent pour aboutir
à un document. Il n’a été à l’enquête publique que tout récemment :
Alors que dans son article L 121-1 le code de l’urbanisme
prévoie que le SCOT détermine les conditions permettant d’assurer l’équilibre,
dans le respect du développement durable, ce fameux Scot Littoral Sud n’a pas
joué son rôle d’encadrement du PLU car en réalité le SCOT Littoral Sud est
toujours en cours d’élaboration et il s’adapte aux divers PLU en donnant un
avis favorable quasi-permanent aux projets des maires des 20 communes comprises
dans son territoire.
Pour parvenir à un consensus, ce document préparatoire
contient certes des orientations mais aucune contrainte qui puisse constituer
une gêne pour les communes dans l’élaboration de leur PLU.
Ainsi, il fait fi, entre autre, de la préservation des
espaces affectés aux activités agricoles et forestières et de la protection des
sites, des milieux et paysages naturels, de la préservation et de la remise en
bon état des continuités écologiques alors que des dispositifs spécifiques de
protection, ZAP et PAEN, ont été mis en place respectivement en 1999 et 2005.
Que devient l’Opération Concerté d’Aménagement et de Gestion des Espaces
Ruraux (OCAGER) ? Des litiges sont
inéluctables
L’OCAGER a été lancée par la Communauté de communes et la
Chambre d’agriculture en mai 2010. Le maire de Laroque des Albères l’a fait
adopter majoritairement par le conseil municipal en séance du 17 juin 2011. Sur
le territoire de Laroque des Albères, excepté quelques terrains situés au sud
du vieux village, il englobe la quasi-totalité des terrains qui sont visés par
le PAEN initié sur la commune de Laroque des Albères.
L’OCAGER Albères Côte Vermeille
Extrait du CM de Laroque des Albères du 17.06.2011
Dans le cadre de l’OCAGER , la compétence a été donnée conjointement
à la SAFER et à la Chambre d’Agriculture pour assurer le développement des
territoires concernés, trouver des investisseurs et monter des dossiers de
subvention pour financer parties des projets qui seront retenus.
Quelle règle s’imposera alors, celle du PAEN qui relève du
Conseil Général, ou bien celle qui a été approuvé et qui relève de l’Ocager de
la Communauté des Commune.
Il y a un grand silence sur ce fait substantiellement
important qui génèrera à coup sûr des conflits d’ordre politique et surtout
financiers dont partie pourrait être imputé à la commune de Laroque des
Albères.
Il y aura forcément des litiges, certains élus ou
investisseurs se réclameront du PAEN et d’autres de l’OCAGER. Nous allons vers la
création d’une situation juridique inextricable qui échappera à toute
information publique ; cela se règlera entre décideurs sans
concertation, « le vin étant tiré, il ne restera plus qu’à le
boire ».
Un PAEN sans étude sérieuse préalable
Le maire candidat de Laroque des Albères s’accommode bien
des lacunes permissives du SCOT et combine, avec le concours du département, un
PAEN sorti de derrière les fagots sur Laroque des Albères.
Il nous convoque pour avoir notre avis alors que tout le
dossier est pratiquement ficelé.
Déjà mesuré à 600 hectares dont les pourtours vont être
définis à la louche sans projet ou action cohérente, sans chiffrage financier,
sans étude environnementale, sans étude d’impact sur les scénarios de cultures,
sans estimation des besoins en eau, sans élaboration d’un prévisionnel
permettant d’affirmer la pérennité économique des actions à développer, sans
étude de marché pour les activités possibles, sans analyse des sols, sans
recensement pertinent des besoins et de la demande, et tant pis si le village
perd sa silhouette et son identité.
Un PAEN n’a de sens que sur tout le piémont des Albères, d’Argelès au
Boulou
Nous pensons que l’instrument PAEN doit être utilisé à
l’échelle du SCOT ou de l’intercommunalité et s’inscrire dans un projet
d’aménagement global, d’Argelès-Plage au Boulou, pour être pertinent et non se
cantonner uniquement sur le territoire de la commune de Laroque des Albères.
Comment se fait-il que les maires d’Argelès, de Sorède, de
Saint-André qui font partie du comité de pilotage du PAEN sur Laroque des
Albères n’initient pas de PAEN sur leurs communes ; pourtant les
dispositions issues de la loi DTR n° 2005-157 du 23 février 2005 et de son
décret d’application n°2006-821 du 7 juillet 2006 existent depuis plus de 6 ans
soit la durée d’un mandat local.
Pourquoi tout le secteur Sud des Vernedes est-il exclu du périmètre du
PAEN ?
À l’ouest du lotissement de Tanyà et au-delà du chemin de
la Boutade, les promoteurs sont aux aguets et on leur laisse le champ libre, et
on organise même le négoce. Ce n’est pourtant pas un secteur destiné à loger
les déshérités.
Prétendre, comme le fait le maire, instaurer un PAEN pour
lutter contre la spéculation, et en même temps réserver de rares - et donc
chers -terrains pour urbaniser relève de la farce.
La genèse du PAEN de Laroque des Albères
Il y a d’abord eu la volonté de ne pas urbaniser le
secteur Sud de l’avenue des Mas Catalans, au pied des Albères ; en effet, c’est
là que vit le premier maire et toujours conseiller municipal de cette équipe
municipale. La vue sur la montagne y est exceptionnelle.
Cette équipe a cherché des règles suffisamment stables
pour qu’à l’occasion de nouvelles élections la donne ne puisse pas être
modifiée. Un PLU, une équipe le fait, une autre le défait.
La solution géniale trouvée par cette équipe : le
PAEN, car seul un décret ministériel peut autoriser d’extraire un terrain du
périmètre du PAEN (code de l’urbanisme, L. 143-5).
Mais à l’occasion d’une première enquête publique, il est
ressorti qu’on ne fait pas un PAEN sur quelques hectares pour un projet fumeux
d’olivette et de champ de safran.
Et c’est là que le maire de Laroque s’est lancé sur un
grand PAEN, pour justifier le petit.
La tactique électorale
Nous pensons aussi que le projet de PAEN sur Laroque
intervient à un moment opportun en matière de popularité pour faire croire, à
proximité d’une échéance électorale, que les personnes qui ont des avis
différents sont des anti-écologistes ne se préoccupant que de leurs propres
intérêts.
Il est légitime d’avoir des doutes sérieux sur les
intentions réelles du maire et de ses adjoints : les mêmes, qui se
présentent comme de grands protecteurs de l’environnement, ont précédemment mis
aux oubliettes la Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et
Paysagé (ZPPAUP) initiée par l’ancienne municipalité et l’État.
Cette municipalité agit selon l’inspiration et les intérêts du
moment : sur des terrains agricoles, elle avait voté la révision du POS pour
créer 10ha de photovoltaïque, et a dû faire marche arrière sur injonction du
préfet
Le projet était situé au vieux chemin des Gabarres, au sud
est de la déchetterie, en plein PAEN.
Un « enjeu planétaire », CM du 18.08.2009
CM du 20.10.2009
CM du 28.12.2009, vote, deux contre
…
CM du 27 avril 2010 à
le préfet demande le retrait de la délibération, vote à l’unanimité…
PAEN implique expropriation
Nous ne voulons pas prendre le risque d’être expropriés au profit de
quelques « bidouilleurs »
Ma famille est propriétaire depuis quelques siècles
d’environ 3ha d’anciennes vignes situées dans le périmètre projeté (El Pou de
Les Vernedes, Les Gavarres). Notre génération aujourd’hui ne les exploite
plus ; avant les vignes il y avait eu des oliviers ; nous ne savons
pas ce que feront les générations suivantes. Nous ne voulons pas prendre le
risque d’être expropriés de notre bien au profit d’investisseurs dont nous ne
savons rien.
Vu l’état de délabrement des institutions de ce pays, et
tout particulièrement du département des Pyrénées-Orientales, vu la modestie du
contrôle de la légalité, vu l’état de la justice, nous n’avons absolument
aucune confiance sur le mode d’attribution à venir de ces terres ; à quels
copains ou coquins ou les deux à la fois seront-elles cédées voire
bradées ? Pour des activités agricoles qui dureront dix ans au mieux ?
C’est le contrat standard des SAFERS, le temps de percevoir quelques
subventions, pour ensuite laisser place à quelques opérations immobilières :
« je suis agriculteur, j’ai le droit de faire ma villa en zone
agricole ! » Et bien sûr le permis est signé. Puis la villa est
vendue à un non agriculteur, et le tour est joué. Nous avons plusieurs exemples
à Laroque :
Des villas aux Vernedes, Chemin de la Boutade, en plein
PAEN, les 2 au sud ont déjà été revendues
Une villa à l’Est de la route de St Genis (périmètre PAEN)
En descendant à la zone commerciale, face à la
déchetterie, villa construite pour une exploitation agricole d’abricotiers
(périmètre PAEN)
Etc. etc.
Nous avons aussi sous les yeux l’exemple de l’embryon de
PAEN à Laroque, au sud de l’avenue des Mas catalans, sur les terrains que la
commune vient de donner à bail pour un loyer symbolique : les olives n’ont
même pas été récoltés cet automne 2013… L’agriculture n’a été qu’un alibi.
Si j’ai pu voter en faveur du projet de PAEN, en qualité
de conseiller municipal, c’est que je n’avais pas perçu – les documents et les
discours ne sont évidemment pas clairs - que le PAEN permettait
l’expropriation ; ce n’est que lors d’une réunion publique au cours de
laquelle un habitant de la commune, M. Gouzien, a essayé d’alerter la
population que j’ai commencé à percevoir la nature du risque.
Pour nous résumer :
Il n’est pas sérieux ni cohérent d’instaurer un
PAEN sur le seul territoire d’une commune ; c’est tout le piémont des
Albères qui doit être concerné dans le périmètre ;
Il n’est pas sérieux d’instaurer un PAEN sur des
terres à vigne et en même temps oublier de recenser des vignes en pleine
production situées sur des secteurs à urbaniser.
Il n’est pas sérieux de valider un projet sans
conviction, né de l’inspiration du moment.
Nous ne trouvons dans le dossier aucune étude
sérieuse sur les possibilités de développement agricole raisonné dans le cadre
du PAEN projeté ;
Le PAEN (compétence du CG66) butte frontalement
avec l’OCAGER (compétence de la Com. Com.) déjà votée par le conseil
municipal ; nous nous enfonçons dans un micmac juridique inextricable ;
le document soumis à l’enquête publique « pièce complémentaire établie
pour l’enquête publique… », en sa page 8 consacrée aux compatibilités du
projet de PAEN avec les autres documents d’urbanisme, omet totalement de
mentionner l’OCAGER ; l’enquête est entachée d’irrégularité.
La population n’a pas vraiment été informée de
ce que le PAEN implique la possibilité d’exproprier ; d’où le faible
nombre de remarques dans le registre d’enquête publique. Comment la population
peut-elle imaginer qu’une municipalité « de droite » va mettre en
œuvre un système d’expropriation ? Les documents soumis à l’enquête
publique occultent la possibilité d’expropriation et ne parlent que de
préemption ; l’enquête publique est entachée d’une très grave irrégularité.
Exemple : Cf. « pièce complémentaire établie pour l’enquête
publique… », Page 15 :
…
Sur ce point déjà l’enquête publique est entachée
d’illégalité.
Nous trouvons lamentable que pour protéger la
vue sur la montagne dont bénéficie un élu, on en arrive à une telle
usine-à-gaz, aux frais des contribuables, et à la possibilité de pouvoir
exproprier d’autres citoyens sans autre forme de procès ;
Par ce PAEN on prétend combattre la spéculation
mais en fait on organise les bonnes affaires de certains sur les biens
d’autrui. Nous n’avons absolument aucune confiance dans la régularité du
devenir et des opérations d’attribution des terres sur le périmètre du PAEN, rien
n’a été discuté et nous n’avons rien vu dans le dossier pour nous rassurer.
Marie TOCABENS vve VIDAL Marc
VIDAL TOCABENS